Let’s rediscover (version française)
Salon Suisse 2016: Jeudi 16 Juin
« Le Salon Suisse de cette année aspire à reconstruire les ponts entre le passé et le présent, détruits par le courant moderniste qui a dominé l’architecture du XXe siècle. » C’est avec cette affirmation que Leïla el-Wakil a inauguré la première des trois soirées « Let’s rediscover ». Pour assouvir cette ambition, la salonnière compte s’inspirer non seulement du passé, mais aussi de l’instant présent. El-Wakil a invité l’architecte Laurent de Wurstemberger et l’ingénieur Rodrigo Fernandez à Venise pour le coup d’envoi de la Biennale. Les deux jeunes Romands se sont dotés d’une mission atypique, celle de mettre les briques de terre sur le marché suisse par l’intermédiaire de leur entreprise Terrabloc, qu’ils ont fondée en 2011.
Des séquences vidéo poétiques
Le duo de Terrabloc est arrivé en même temps que le vidéaste Samuel Dématraz, qui a assuré aux deux jeunes entrepreneurs une entrée en scène artistique des plus subtiles. En effet, le réalisateur a mis sur pied une mosaïque de petites vidéos montrant l’équipe de Terrabloc à l’œuvre. En allant du gravier ruisselant jusqu’au produit fini, ce « panoptique » de séquences filmiques présentait les différentes étapes du processus de fabrication des blocs de terre compressée. Dématraz a projeté sur l’écran au-dessus de la scène, garnie de blocs Terrabloc et d’échantillons de matériaux, de lentes séquences vidéo superposées à la manière d’un mur fait de blocs.
Faire de l’excavation une ressource
Chaque année, un million de mètres cubes de terre sont excavés du sol genevois. Cette information a fait office de prélude à l’intervention de Laurent de Wurstemberger et de Rodrigo Fernandez. Les deux collaborateurs souhaiteraient utiliser les déblais de ces excavations, dont l’évacuation est généralement aux frais de l’entrepreneur, à bon escient. Voilà deux ans que le duo tâte le terrain à la recherche d’une combinaison de matières excavées optimale pour la construction. Dans cette entreprise, les deux Romands sont parfaitement complémentaires en termes de connaissances professionnelles et scientifiques : spécialiste en matériaux notoire au sein de l’industrie, l’ingénieur Fernandez a développé le bon amalgame et la bonne granulométrie de pierre, de gravier, d’argile, de sable et de boue, tandis que l’architecte de Wurstemberger a optimisé le processus de production et s’est chargé des formalités de commercialisation. Il s’est en outre occupé de l’agencement des briques en tant que modules, autrement dit de la modularité des briques , il a imaginé plusieurs manières de les utiliser et s’est mis en quête de projets initiaux. L’entreprise Terrabloc n’a pas tardé à récolter les fruits de son labeur : grâce à la bourse cantonale du développement durable, les deux Romands ont pu acquérir, en 2011, leur première presse hydraulique. Jusqu’à présent, Terrabloc a réalisé quatre projets en Suisse romande.
Une plus-value pour la construction écologique et pour la physique du bâtiment
De Wurstemberger et Fernandez ont clairement mis en avant le potentiel des blocs de terre : ils ont confronté le prix de ce type de briques, actuellement plus élevé de 30% par rapport à une brique traditionnelle, à la plus-value écologique et physique qu’il représente. Ce surcoût se justifie par une composition entièrement naturelle, une bonne régulation de l’humidité, une isolation sonore optimale et l’absence d’allergènes. Fernandez ajoute qu’environ 70% des excavations en Suisse, et c’est aussi le cas pour d’autres pays occidentaux, peuvent être utilisées. Les briques étant simples à fabriquer et à entreposer sur un chantier, le contremaitre peut lui-aussi participer à leur production, explique de Wurstemberger. Terrabloc a déjà pu mettre en exergue cette composante sociale dans le cadre d’un projet de bâtiment d’exposition à Vessy. Au cours d’un programme de réinsertion de chômeurs en fin de droits, l’entrepreneur a effectivement mis la main à la pâte pour produire des briques aux côtés des ouvriers. De Wurstemberger ajoute qu’on pourrait très bien imaginer qu’un (citoyen ou un) propriétaire puisse, à l’avenir, saisir ce type d’opportunité pour participer directement à la construction de son logement.
Quelque 700 blocs par jour
Terrabloc est encore une manufacture : une personne a besoin d’environ 30 secondes pour presser une brique. La production maximale s’élève actuellement à environ 700 pièces par jour. Avec un tel rendement, impossible de rivaliser avec l’industrie. Plutôt que d’envisager une industrialisation de son processus de fabrication, l’entreprise genevoise mise sur l’expansion de ses sites de production. En effet, lorsque la production se fait directement sur le chantier, la distance qui sépare le lieu d’excavation du lieu de compression de briques ou des fondations s’en trouve réduite au minimum, avantage qui s’inscrit dans un système de construction fait pour durer. Jusqu’ici, les murs de Terrabloc n’étaient pas porteurs. En 2017, la cantine d’une petite école dans le parc Geisendorf à Genève sera le premier édifice possédant des murs porteurs en brique de terre.
Des briques à brac ?
Le fait que les briques Terrabloc contiennent 5% de ciment est une concession à la pureté du matériau, qui peut être faite sans mauvaise conscience : ces 5% permettent une diffusion plus grande et plus facile dans le domaine de la construction suisse, dit Fernandez. Les constructeurs de terre purs et durs que sont Martin Rauch et Anna Heringer, présents lors de la cérémonie d’ouverture du Salon Suisse, considèrent cette formule moins dogmatique comme une trahison. L’ingénieur explique que Terrabloc mise d’abord sur l’intelligence du matériau, puis sur sa pureté. Mais il est ici avant tout question de survie, a franchement avoué de Wurstemberger. Bien que son avenir soit prometteur, l’entreprise en reste, malgré le soutien d’investisseurs et de sponsors, encore à ses débuts.
Rodrigo Fernandez, Switzerland: material scientist. Born in Montevideo, he graduated from EPFL (2003) and got his PhD in 2009. During his studies he explored the potential of stabilized compressed earth as well as calcined clays as a potential replacement for cement in developing countries. He has always been interested in alternative construction materials and learned from all the sustainable solutions that he explored during his career to develop the ecological concept of Terrabloc (2011) with his partner, the architect Laurent de Wurstemberger.
Laurent de Wurstemberger, Switzerland: architect. Born in Geneva, he graduated in 2002 from the Accademia di Architettura de Mendrisio. He participated in the creation of Ar-ter, atelier d’architecture-territoire (Geneva). Being passionate of earthern architecture, he participated in the construction of a rammed-earth wall in 2010 for the garden of the town hall of Confignon in collaboration with Martin Rauch. Since then, he strives to reintroduce earth as a contemporary and sustainable construction material and founded Terrabloc (2011) together with his partner, the engineer Rodrigo Fernandez.
Samuel Dématraz, Switzerland: filmmaker. After studying philosophy at the University of Fribourg, Dématraz pursued his education in visual arts at the Ecole Cantonale d’Art du Valais (2003–2006). Both, video artist and filmmaker, Dématraz has multiplied interesting Swiss and international collaborations, namely with Jean-François Amiguet, Catherine Beaugrand, and the Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts in Lyon, also engaging in research. He has won many awards and has contributed to numerous exhibitions. Dématraz founded Ecliptic Films (2014) in order to develop and produce different film projects.
Redaktion: Roderick Hönig (Hochparterre)
Produktion: Roderick Hönig (Hochparterre), Urs Honegger (Hochparterre)
Korrektorat: Beat Zaugg
Porträt Terrabloc: Pierre Vallier
Porträt: Samuel Dématraz: Aline Fournier
Copyright: Pro Helvetia & Hochparterre 2016
Hochparterre dokumentiert den «Salon Suisse» 2016. Als offizieller Medienpartner begleiten wir die Veranstaltungsreihe mit Hintergrundinformationen, Zusammenfassungen, Audiostatements, Bildern und Livestreamings. Der «Salon Suisse» ist das Begleitprogramm des Schweizer Auftritts an der 15. Internationalen Architekturbiennale – La Biennale di Venezia. Der «Salon Suisse» ist eine Initiative der Schweizer Kulturstiftung Pro Helvetia.
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Hochparterre exclusively documents the «Salon Suisse» 2016 starting 1st june 2016. As official media partner Hochparterre provides multimedia background information with written articles, audiostatements, visuals and free live streaming of part of the «Salon Suisse» talks. «Salon Suisse» is a talks and event programme complementing Switzerland’s national participation at the 15th International Architecture Exhibition – La Biennale di Venezia. It is initiated by the Swiss Arts Council Pro Helvetia.